Karmapa : dans les média

mercredi 1er mars 2000 par Webmestre

A signaler entre autres dans les médias français un article à la Une du Figaro signé du correspondant de ce journal à Pékin, avec une superbe photo en couleur du jeune Karmapa Urgyen Trinley Dorje, un article à la "Une" du journal Le Monde, une mention sur France 2 et l’interview de JP Ribes sur France Culture.

Le choix de la liberté

Article publié dans le n° 14 d’Actualités des Religions, mars 2000

L’arrivée surprise à Dharamsala, capitale d’exil du Dalaï Lama, d’un garçon de 14 ans au regard déterminé vient de modifier à nouveau la donne des relations sino-tibétaines. Le jeune homme, Orgyen Trinley Dorje, est un des plus hauts dignitaires du bouddhisme tibétain. Son titre, le Gyalwa Karmapa, qui signifie littéralement le "Victorieux détenteur de l’activité éveillée", le place à la tête des Karma Kagyu, branche majoritaire d’une des quatre grandes écoles tibétaines. Il est considéré comme la XVIIe réincarnation d’un sage, né en 1100 et reconnu comme un "boddhisattva" par Gampopa, disciple et héritier spirituel de Milarépa, le grand Yogi du XIe siècle.
Aventureuse et proche de l’exploit sportif, sa fuite du Tibet occupé à travers les Himalayas passionne et intrigue les médias, qui ont du mal à s’y retrouver dans les titres et les rangs, au risque d’avoir recours aux expressions toute faites. Comme ce "bouddha vivant", formule utilisée à tort par les missionnaires puis reprise avec ironie par les Chinois, pour désigner la renaissance d’un grand maître, en tibétain un "Tulkou". Malgré le silence prudent des autorités tibétaines et indiennes et le bas profil adopté par les médias chinois, qui s’obstinent à parler d’un déplacement provisoire destiné à la recherche "d’instruments religieux et d’une coiffe traditionnelle", on peut d’ores et déjà analyser la défection du jeune Rinpoché ("précieux") comme une amère défaite de la stratégie chinoise de lutte contre le Dalaï Lama. Celle-ci se fondait en effet, depuis quelques années déjà sur deux axes complémentaires : la disparition, à terme, du dirigeant tibétain, qui n’est âgé que de 64 ans, et son remplacement par un chef religieux "patriotique" aux ordres de Pékin. Le jeune Karmapa constituait une alternative séduisante.
Formé dans le sérail, appartenant à une autre école que celle où se retrouvent, depuis le XVIIe siècle, les Dalaï Lamas, il serait à même de briser la résistance du Tibet central, au risque de réveiller quelques divisions séculaires entre religieux, pour le plus grand bien de la "mère patrie" chinoise. Las, voici que par sa marche courageuse vers la liberté, le jeune homme vient offrir au Prix Nobel de la Paix et à ce qu’il représente, le temps que lui donne sa jeunesse et la continuité dans la revendication d’identité. En prime, il apporte la reconnaissance que lui ont accordée les dirigeants chinois par les voix les plus officielles de Li Peng et de Jiang Zemin .Ceux ci ne se lassaient pas en effet de louer le jeune homme qui s’exprimait dans un mandarin si bien appris. Et qui n’en gardait pas moins ses convictions. S’ils ne saisissent pas cette occasion de revoir de fond en comble leur politique au Tibet, ce qui est hélas l’hypothèse la plus probable, les dirigeants chinois risquent de faire peser encore plus lourdement leur joug sur ces Tibétains rebelles. Par la répression d’une part, mais aussi en accélérant la constitution d’une "église patriotique" bouddhiste avec la nomination à tout va de Rinpochés fantoches, comme ils viennent de le faire quelques jours après le départ du Karmapa, en consacrant "leur" renaissance de l’ancien régent Réting. Une politique inaugurée en 1995 avec l’enlèvement du petit Gedhun Choekyi Nyima, qui venait d’être reconnu par le Dalaï Lama, et son remplacement sur le trône des Panchen Lamas par un autre petit garçon du même âge. Une décision que les Tibétains, dans leur majorité, refusent d’avaliser. Cette attitude s’inscrit d’ailleurs dans une stratégie globale de domestication du sentiment religieux, appliquée aussi bien aux musulmans du Xinjiang qu’aux catholiques et aux protestants chinois et aux adeptes du FalunGong, purs produits de la culture chinoise. Inspirée par un repli craintif et le souci de sa propre protection, cette permanence dans l’autoritarisme révèle, paradoxalement, la force des religions lorsqu’elles sont vécues comme une liberté de l’esprit.

Jean-Paul Ribes

Nous avons également retenu ce commentaire paru sur Fraternet (citation intégrale) :

« Un homme d’action »

Urgyen Trinley Dorje est arrivé à Dharamsala, en Inde, où il a rejoint le gouvernement du Dalaï Lama en exil. Le jeune homme, âgé de quatorze ans, est le 17ème "Bouddha vivant" [1] Gyalwa Karmapa : autrement dit, un chef religieux incontesté et reconnu comme tel par les autorités chinoises. Dans la lettre qu’il a laissée pour expliquer son départ, le Karmapa explique qu’il se rend en Inde pour y trouver "des instruments de musique et des bonnets noirs", ajoutant que "cela ne signifie pas trahir la nation".

Bien entendu, l’arrivée en Inde du Karmapa est un signe fort à l’égard de la communauté tibétaine qui vit depuis quarante ans sous le joug de la République Populaire de Chine. Ces dernières années, l’occupant chinois s’est engagé dans une campagne visant à éradiquer l’influence du bouddhisme et saper l’autorité morale et spirituelle du Dalaï Lama. Dernièrement, les autorités chinoises ont aggravé la répression, expulsant des centaines de moines et de moniales de leurs monastères tandis que d’autres continuent de subir la torture et les mauvais traitements dans les prisons de Lhassa.

Il est intéressant de noter qu’avant de mourir, le 16ème Karmapa avait évoqué les conditions de sa prochaine incarnation, annonçant que sa naissance au Tibet constituerait un symbole particulier et qu’il aurait à accomplir un travail beaucoup plus important. Quand on sait que le terme de "Karmapa" signifie "homme d’action", on peut penser que le jeune homme a pris sérieusement son destin en main : les raisons mêmes invoquées pour justifier son départ traduisent l’impossibilité pour les Tibétains de pratiquer leur religion et d’assurer la pérennité de leur culture.

Souhaitons que son action auprès du Dalaï Lama incite la communauté internationale à accomplir son devoir de gardienne des Droits de l’Homme à l’égard du peuple tibétain.

Source : www.fraternet.com

[1] L’expression tibétaine "Tulkou" ou "Emanation" serait plus adéquate que celle de "Boudhha vivant", utilisée volontiers par les documents chinois.


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