"Neige", de Pema Tseden

Traduction par Françoise Robin et Brigitte Duzan

vendredi 4 janvier 2013 par Rédaction , Jean-Paul Ribes

"Neige", de Pema TsedenIl faut encore une fois saluer le travail de Françoise Robin [1] qui, avec une persévérance digne d’éloge, s’emploie à nous donner accès à la littérature tibétaine contemporaine.
Dernière traduction en date, avec le concours de Brigitte Duzan [2] pour les textes en langue chinoise, "Neige" est un recueil de sept nouvelles écrites par Pema Tseden [3] de 1994 à 2011. L’auteur est un écrivain reconnu, aussi bien pour ses ouvrages écrits en mandarin qu’en tibétain, et comme beaucoup de membres de sa génération, manie aussi bien les deux langues. Mais il est encore plus connu pour son œuvre cinématographique, dont le dernier titre "old dog" [4] a été présenté et primé dans de nombreux festivals internationaux.
"Neige" est un livre attachant. Talent narratif, dessin des personnages, émotion, retenue du récit, en sont les principales qualités.

Dans les années ’80, suivre les enseignements de maitres tibétains passait pour une coquetterie exotique et vaine. "C’est une pensée pour Orientaux", entendait-on. De même, il n’est pas rare de voir la culture tibétaine affublée, notamment par les Chinois, de qualificatifs de "folklorique" ou "exotique".
C’est gravement se méprendre sur le caractère universel de cette culture.
Certes elle affirme sa spécificité, par son cadre, voire même le déroulé narratif, la psychologie de ses personnages, l’évocation de traditions culturelles.
Mais ce qui ressort est d’une autre dimension, plus complexe, qui nous rend les personnages proches, bien au-delà de leur différence.

Certains amis du Tibet pourront, à juste titre se poser la question de la possibilité d’une création littéraire dans les conditions politiques et sociales du Tibet d’aujourd’hui.
C’est précisément toute la richesse de l’œuvre de Pema Tseden que de nous décrire ce Tibet partagé entre l’influence grandissante de la Chine et la persistance d’une identité qui tente de survivre sans s’enfermer dans la seule tradition. On pense aux grands auteurs de la littérature maghrébine, souvent en langue française, que furent Kateb Yacine ou Mouloud Feraoun.
C’est ici au lecteur à faire preuve de discernement et de comprendre toute l’ironie de "petite natte" récitant par cœur et d’une seule traite le "servir le peuple" de Mao devant des apparachiks stupéfaits et admiratifs. De même comment faut-il comprendre la transparence absolue du corps des deux "Neige", le garçon et la fille, qui ne cache rien du fonctionnement de leurs organes. Ou encore la lente recherche d’Akhu Thöpa ou l’on voit se dessiner une personnalité multiple, au fur et à mesure des témoignages.
La destruction des stéréotypes, finalement, est le plus sûr moyen de s’approcher et probablement d’aider une culture en mutation. Et c’est aussi la garantie d’un vrai plaisir de lecture.


Sept histoires du Tibet par un écrivain qui est aussi un célèbre cinéaste tibétain.
Sept histoires où nous cheminons un moment en compagnie d’hommes et de femmes dans le Tibet d’aujourd’hui, loin d’une image folklorique ou idéaliser, un Tibet lointain par ses paysages et proche par son humanité.

"Neige", Pema Tseden, Editions Philippe Picquier
175p. 17€50.
ISBN 2.8097.0392.4
Sortie le 4 janvier 2013

- Fiche et extraits sur le site de l’éditeur.
- Biographie de Pema Tseden sur le site du Festival International du Film de La Rochelle (voir en bas de page)

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[1] Françoise Robin est professeur de tibétain à l’INALCO, et spécialiste de littérature tibétaine contemporaine

[2] Brigitte Duzan est traductrice et spécialiste de cinéma chinois et littérature chinoise contemporaine

[3] Pema Tseden est célèbre dans le monde tibétain contemporain, tant pour ses nouvelles, qu’il publie dans des magazines littéraires tibétains et chinois depuis bientôt vingt ans, que pour sa carrière de réalisateur. Sur le plan international, il doit sa notoriété à ses trois longs métrages, qui ont obtenu de nombreuses récompenses lors de festivals internationaux. Il fait aujourd’hui figure de chef de file d’un cinéma tibétain émergent. Le 39e festival de La Rochelle, sensible à son œuvre cinématographique et souhaitant le faire connaître du grand public, lui a consacré en 2012 sa section Découverte.

[4] "old dog" : Un vieux pasteur nomade est fâché contre son fils parti en ville vendre leur mastiff tibétain, une race de chien extrê­mement à la mode parmi les riches Chinois. Il décide de rache­ter l’animal. Mais le chien ne cesse de changer de propriétaire et la relation père/fils en subit les conséquences…


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