Résolution du Parlement européen du 26 novembre 2009 sur la Chine

droits des minorités et application de la peine de mort

mardi 1er décembre 2009 par Rédaction

Le Parlement européen,
- vu ses précédentes résolutions du 1er février 2007 et du 27 septembre 2007 concernant un moratoire universel sur la peine de mort,
- vu les résolutions du 18 décembre 2007 (A/RES/62/149) et du 18 décembre 2008 (A/RES/63/168) intitulées "Moratoire sur l’application de la peine de mort", adoptées par l’Assemblée générale des Nations unies,
- vu les déclarations de la Présidence au nom de l’Union européenne du 29 octobre 2009, concernant l’exécution des deux Tibétains, Lobsang Gyaltsen et Loyak, et du 12 novembre 2009, concernant l’exécution de neuf personnes d’ethnie ouïgoure à la suite des émeutes du 5, 6 et 7 juillet 2009 à Urumqi, dans la région autonome ouïgoure du Xinjiang,
- vu les articles 35, 36 et 37 de la Constitution de la République populaire de Chine [1] qui garantissent que tous les citoyens jouissent de la liberté d’expression et de la liberté de croyance religieuse et présentent la liberté individuelle comme "inviolable"
- vu ses précédentes résolutions sur la Chine, en particulier celle du 13 décembre 2007 sur les relations UE-Chine et sur le dialogue UE-Chine concernant les droits de l’homme,
- vu le séminaire UE-Chine des 18 et 19 novembre 2009 et la 28e session du dialogue UE-Chine concernant les droits de l’homme qui s’est tenue à Pékin le 20 novembre 2009,
- vu la 27e session du dialogue UE-Chine concernant les droits de l’homme qui s’est tenue à Prague le 14 mai 2009,
- vu le 12e sommet UE-Chine qui doit se tenir le 30 novembre 2009 à Nanjing,
- vu l’article 122, paragraphe 5, de son règlement,

A. considérant que l’Union se fonde sur l’adhésion aux valeurs de liberté, de démocratie et de respect des droits de l’homme et à l’état de droit et qu’elle considère que le respect de ces droits inaliénables constitue une condition préalable indispensable pour une vie sociale harmonieuse,

B. considérant que le partenariat stratégique UE-Chine, en cours de négociation, revêt une grande importance pour les relations entre l’Union et la Chine à l’avenir et qu’un véritable partenariat doit se fonder sur des valeurs communes partagées,

C. considérant que, le 8 mai 2009, l’Union a demandé la commutation des condamnations à mort prononcées à l’encontre de nombreux Tibétains par le Tribunal intermédiaire populaire de Lhassa à la suite des émeutes de mars 2008 dans cette ville, [2]

D. considérant que, au début du mois de juillet 2009, des violences ethniques, les pires depuis des décennies, ont éclaté dans la région autonome ouïgoure du Xinjiang après que des manifestants ouïgours furent descendus dans la rue et eurent attaqué des Chinois hans à Urumqi, blessant certains d’entre eux, afin de protester contre les attaques dont avaient été victimes des travailleurs ouïgours d’une usine du sud de la Chine en juin 2009 ; considérant que, selon les chiffres officiels, 197 personnes ont trouvé la mort et 1 600 autres ont été blessées,

E. considérant que, pour assurer une cohabitation pacifique des Tibétains et des Ouïgours, qui représentent les deux minorités ethniques majeures en Chine, avec la grande majorité du peuple chinois, qui est d’origine han, il est impératif d’instaurer un dialogue sincère, permanent et mutuellement respectueux,

F. considérant que le mécontentement et le ressentiment grandissent au sein de la population ouïgoure ‐ qui est en majorité musulmane, partage des liens linguistiques et culturels avec l’Asie centrale et représente près de la moitié des vingt millions d’habitants du Xinjiang ‐ à l’encontre des autorités, constituées en majorité de chinois hans, accusées de contrôler et de limiter étroitement les activités religieuses, dans un contexte de discrimination à l’emploi et de marginalisation de leur groupe ethnique dans la région ; considérant que l’appel lancé par les ONG actives dans le domaine des droits de l’homme à la communauté internationale en vue de l’envoi d’une commission d’enquête indépendante sur le site des émeutes n’a pas été entendu,

G. considérant que la République populaire de Chine a déclaré qu’elle aspirait à des relations ethniques harmonieuses dans la région autonome ouïgoure du Xinjiang,

H. considérant que la légitimité des sentences prononcées à l’égard des Tibétains condamnés pour crime lors des émeutes de mars 2008 a été mise en doute dans un rapport de l’organisation "Human Rights Watch" qui indique que certaines procédures judiciaires se sont déroulées dans le secret et à des dates non dévoilées et que les Tibétains n’ont pas eu accès à une véritable défense assurée par des avocats choisis par eux,

I. considérant que la pratique religieuse est soumise en Chine à des restrictions et est étroitement contrôlée par l’État,

J. considérant que la peine de mort est applicable à 68 infractions en Chine, y compris des infractions n’impliquant aucune violence telles que la fraude fiscale ou les délits liés à la drogue,


1. réitère son opposition de longue date à la peine de mort dans tous les cas et dans toutes les circonstances ; rappelle que l’Union européenne s’est fermement engagée à œuvrer en faveur de l’abolition de la peine de mort partout dans le monde et souligne une fois de plus que l’abolition de la peine de mort contribue au renforcement de la dignité humaine et au développement progressif des droits de l’homme ;

2. reconnaît que le fait que la Cour populaire suprême ait, depuis janvier 2007, le pouvoir de réviser les condamnations à mort constitue une avancée positive, mais regrette que cela n’ait pas entraîné une baisse significative du nombre d’exécutions en Chine ; reste préoccupé par le fait que la Chine demeure le pays du monde où les exécutions sont les plus nombreuses ;

3. invite donc instamment le gouvernement chinois à adopter un moratoire sur la peine de mort sans délai et sans conditions, ce qui constituerait une avancée cruciale vers l’abolition de la peine de mort ; condamne avec force l’exécution de deux Tibétains, Lobsang Gyaltsen et Loyak, [3] ainsi que de neuf personnes d’origine ouïgoure à la suite, respectivement, des événements de mars 2008 à Lhassa et des émeutes des 5, 6 et 7 juillet 2009 à Urumqi ; demande aux autorités chinoises de suspendre toutes les autres condamnations à la peine de mort prononcées par les tribunaux intermédiaires populaires de Lhassa et d’Urumqi et de commuer ces condamnations en détention pour les responsables d’actes de violence dûment prouvés ; déplore également les peines capitales avec sursis de deux ans prononcées à l’encontre de Tenzin Phuntsok et Kangtsuk à la suite des manifestations du mois de mars, ainsi que la peine d’emprisonnement à vie à laquelle a été condamné Dawa Sangpo, et émet des doutes quant à l’équité de leurs procès ;

4. invite encore une fois la Chine à ratifier le pacte international sur les droits civils et politiques ; dénonce le traitement souvent discriminatoire envers les minorités ethniques et religieuses en Chine ;

5. souligne que le gouvernement chinois a publié son premier plan national d’action dans le domaine des droits de l’homme (2009-2010) en avril 2009, qui vise notamment à améliorer la protection des droits des citoyens tout au long des procédures répressives et judiciaires, à mettre fin aux détentions arbitraires, à interdire l’obtention d’aveux par la torture et à garantir des procès équitables et ouverts ; demande aux autorités chinoises de rendre public le nombre d’exécutions auxquelles elles procèdent ;

6. appelle les autorités chinoises à tout mettre en œuvre pour développer un véritable dialogue entre Hans et Ouïgours et à adopter des politiques économiques plus intégrées et globales pour le Xinjiang, visant à renforcer l’appropriation locale et à protéger l’identité culturelle de la population ouïgoure ;

7. rappelle avec force que le bilan de la Chine en matière de droits de l’homme reste très préoccupant ; insiste sur la nécessité d’un suivi rigoureux entre les sessions du dialogue UE-Chine sur les droits de l’homme, afin de garantir la mise en œuvre des recommandations résultant des dialogues précédents, mutuellement acceptées par les deux parties, et dans le cadre du séminaire juridique UE-Chine sur les droits de l’homme qui précédait normalement les sessions du dialogue et impliquait des représentants du monde universitaire et de la société civile ; demande au Conseil et à la Commission de mettre à l’ordre du jour du 12e sommet UE-Chine du 30 novembre 2009 les questions de l’abolition de la peine de mort ainsi que du respect des droits des minorités ethniques et des droits religieux, et de continuer à vouloir faire figurer dans le nouvel accord de partenariat et de coopération, en cours de négociation, une clause relative au respect des droits de l’homme en Chine ;

8. demande aux autorités chinoises de mettre immédiatement un terme à la campagne de répression violente qui bafoue les droits des habitants de la région autonome ouïgoure du Xinjiang tout en méconnaissant les causes des troubles ;

9. demande la réouverture d’un dialogue sincère et orienté vers des résultats concrets entre le gouvernement chinois et les représentants du Dalaï Lama, basé sur le mémorandum sur une autonomie réelle pour le peuple tibétain et conduisant à des changements positifs, substantiels et significatifs au Tibet, en accord avec les principes soulignés dans la Constitution et les lois de la République populaire de Chine ;

10. rappelle sa solidarité avec toutes les victimes de évènements qui se sont déroulés à Urumqi, dans la région autonome ouïgoure du Xinjiang, en juillet 2009 ; reconnaît qu’il est du devoir des autorités étatiques de maintenir l’ordre public, mais est préoccupé par les rapports dénonçant un usage disproportionné de la force à l’encontre des personnes d’origine ouïgoure et la détention de nombre d’entre eux ;

11. demande aux autorités chinoises de garantir que les individus arrêtés à la suite des évènements décrits plus haut bénéficient d’un traitement humain au cours de leur détention et d’un procès équitable selon les normes internationales, ce qui implique l’accès à un avocat de leur choix, le respect de la présomption d’innocence et le prononcé de sentences proportionnées à l’encontre des personnes reconnues coupables ;

12. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, aux gouvernements des États membres, au Conseil de l’Europe, au Conseil des droits de l’homme des Nations unies et au gouvernement de la République populaire de Chine.

Source : Parlement européen, 24 novembre 2009

[1] Extraits de la Constitution chinoise :
Article 35 : Les citoyens de la République populaire de Chine disposent de la liberté de parole, de presse, de réunion, d’association, de défilé et de manifestation.
Article 36 : Les citoyens de la République populaire de Chine jouissent de la liberté de religion.
Aucun organisme d’Etat ni aucun groupement social ni aucun individu ne peuvent forcer un citoyen à avoir ou à ne pas avoir de religion, ni faire de discrimination à l’égard d’un croyant ou d’un non-croyant.
L’Etat protège les pratiques religieuses ordinaires. Aucun individu ne peut utiliser la religion aux fins de troubler l’ordre social, la santé des citoyens, nuire au système éducatif de l’Etat.
Les groupements religieux et les affaires religieuses ne doivent subir aucune domination étrangère.
Article 37 : La liberté individuelle des citoyens de la République populaire de Chine est inviolable.
Aucun citoyen ne peut être arrêté sans l’approbation ou la décision d’un parquet populaire, ou sans la décision d’une cour populaire de justice ; toute arrestation est effectuée par les organes de la Sécurité publique.
Sont interdits toute incarcération illégale ou tout autre moyen illégal privant de ou entravant la liberté individuelle des citoyens, et toute fouille corporelle illégale.
Source : Constitution chinoise.

[2] cf. document Word du Parlement européen

[3] cf. l’article "Deux Tibétains exécutés à Lhassa après les émeutes de 2008"


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